Partager cette page :

Causes et conséquences de l'impuissance politique en zone euro

le 23 novembre 2015

18h00 - 19h45

ENS Rennes, Amphithéâtre

Intervention de Michel Aglietta, professeur d’économie (CEPII), dans le cadre des séminaires du département Droit - économie - management, organisé en collaboration avec Clara Guillaumond, Aurore Sivignon et Charlie Noujarret pour le Club EntretiENS et avec le soutien de la FMSH et de Rennes Métropole.

/medias/photo/vignette-seminairedem_1445851344013-jpg

La gouvernance de la zone euro peut être caractérisée comme une « conduite au bord de l’abîme ». La gestion de la crise grecque est l’illustration la plus emblématique de la persistance dans l’erreur. Trois plans d’aide ont été appliqués et des avancées minimales dans la consolidation des structures financières de l’Europe ont été faites en 2011 et 2012 dans le déchaînement de la crise financière qui a forcé des « compromis de la dernière chance ». Près de 5 ans d’une mise en tutelle de la Grèce ont abouti à un recul du PIB de 25%, une chute de l’investissement de 40%, une hausse de plus de 13 points du taux de chômage (atteignant 26% en 2014), et une amputation de 23% des salaires du secteur public ; tout cela pour une augmentation de la dette publique de 109 à 175% du PIB ! La crise sociale résultant de ces « performances » a mené au pouvoir une force politique portant des idées nouvelles. On aurait pu espérer que ce changement fasse bouger les lignes, d’autant que la zone euro dans son ensemble est enlisée dans un équilibre auto-entretenu de croissance trop faible pour faire reculer le chômage. Mais les instances dirigeantes de l’Europe (Ecofin, groupe euro, Conseil européen) restent enfermées dans des postures stéréotypées et bardées de règles arbitraires qui les empêchent de considérer le principe de réalité.

Sans doute le « péché originel » est-il une monnaie unique sans pouvoir politique pour la gouverner conduisant à une monnaie « incomplète » ; les raisons du compromis minimal Mitterrand / Kohl ; les principes constitutionnels qui fondent la souveraineté de la nation en France et en Allemagne sont incompatibles, les divergences économiques qui se sont accumulées avant la crise entre monnaie unique en conséquence de la disparité des politiques économiques nationales… Après la crise financière générale de 2008, les divergences ont provoqué la crise de la zone euro à partir de la Grèce. Les conséquences durables sont importantes : la zone euro est la terre de la croissance basse, du chômage et du manque d'investissement. Une question se pose : quels pourraient être les changements institutionnels  acceptables pour surmonter le déficit politique paralysant la gouvernance de l'ensemble ?

Pour avancer dans cette voie il faut admettre que la gouvernance de la zone euro par une succession de négociations gouvernementales sans principe commun a fait faillite. Pour sortir de l’impasse, il faut accepter un principe de coopération institutionnalisée : des États souverains peuvent décider de coopérer plutôt que de poursuivre un jeu non coopératif sans mettre leur souveraineté en péril. En suivant ce principe on peut explorer une voie intermédiaire entre le fédéralisme et la désagrégation de la zone euro.
Thématique(s)
Formation, Diffusion des savoirs
Partenaires
         
Contact
Gilles Lhuillier, professeur de droit

Mise à jour le 11 mars 2016